Français à Barcelone : nombreux et polis mais râleurs et introvertis !

Cocorico ! Si l’Espagne écrase l’Hexagone en football, les Français, bons joueurs, restent les premiers visiteurs de la Catalogne, et surtout les plus gros consommateurs. Une bouffée d’air frais pour une économie exsangue et un secteur à la peine. Mais l’occasion aussi de se demander si les Français traînent à Barcelone leur réputation mondiale de râleurs pingres et mal polis…

Le triplé, il est à nous. Et pas question de laisser un pourboire. Comment vous ne le savez pas ? Mais nous sommes les pires touristes du monde depuis trois ans de suite selon une étude internationale réalisée par TNS Infratest pour Expedia auprès des hôteliers ! Pingres, râleurs, malpolis, incapables de parler la langue du pays… Ca ne vous rappelle rien ? C’est drôle parce que si on demande à la responsable de la communication de la Agència Catalana de Turisme basée à Paris, le jugement est plus nuancé. Certes, le premier mot qui vient à la bouche de Josefina Mariné, c’est « râleurs par excellence » : « Ce sont des profils qui se plaignent assez souvent sur la qualité, dès qu’il faut faire la queue… »

Tourisme éthylique vs tourisme de qualité

Mais quand on parle de mauvaise image des touristes, d’autres nationalités viennent plus vite à l’esprit : « Ceux qui sont réputés pour la « borrachera » ce sont les Britanniques. » Et oui, le balconing, nouveau sport en vague sur la Costa Dorada et dans les Baléares, qui consiste à se jeter du balcon d’un hôtel –  déjà passablement bourré – à la piscine est très prisé chez les touristes anglais ou allemands. Seul problème, six jeunes touristes en sont morts durant les vacances d’été 2010.

Loin de cet exhibitionnisme éthylique, « le tourisme français, c’est le tourisme de qualité » certifie le président de l’Association des voisins du quartier de la Barceloneta. Au contraire, les voisins d’outre-Pyrénées seraient plutôt « introvertis, ils ne se laissent pas trop aborder, sont assez peu sociables », selon Valentin Arena… L’inverse des Britanniques pour qui boire est la seconde chose que l’on enseigne aux gamins après apprendre à faire ses lacets ?

Les Français, des gens bien comme il faut

A ce niveau-là du débat, il faut reconnaître qu’on peut difficilement définir ce genre de traits de caractères nationaux sans se planter quelque part. Il suffit de jeter un œil à des sites français comme playafiesta.com, organisateur de « springbreak » dans la station balnéaire catalane de Lloret de Mar au départ de toutes les grandes villes de France. Sur le portail web, des photos de filles dénudées et un slogan : « 3 JOURS DE FETE NON STOP ». Les Anglais n’auraient pas mieux trouvé. Cette précision faite, il faut reconnaître que les Français véhiculent tant dans l’imaginaire de Valentin que chez Josefina l’image de gens « éduqués », « très intéressés par la culture », « adeptes de la bonne gastronomie ». Donc de potentiels bons clients dans un pays dont 10% du PIB provient du tourisme et qui cherche à réorienter sa formule « sol y playa » (« soleil et plage ») vers un tourisme durable et de qualité, comme l’ont avancé les professionnels du secteur lors du Salon International du Tourisme (Fitur) qui s’est tenu à Madrid du 19 au 23 janvier.

Si on demande à Josefina, qui vit depuis 10 ans en France, ce qui attire tant les Français – qui représentent 25% de la masse de touristes hors frontière à venir en Catalogne – elle commencera par le côté pratique : « Depuis la France, on peut facilement y aller en voiture. En plus, beaucoup  de nouvelles lignes aériennes ont ouvertes (270 vols directs hebdomadaires, ndlr), ainsi que de nouvelles lignes ferroviaires : le TGV Paris-Barcelone, qui ne prendra plus que 5h30 en 2015, le futur Montpellier-Barcelone ». Ou comment la technologie rapproche les peuples. Mais il y a plus : « Les génies Dalí, Gaudí, Tàpies, Miró, la gastronomie, avec 57 étoiles du Guide Michelin, 17 sites classés au patrimoine de l’Unesco, dont 9 à Barcelone… » Ajoutez à cela que ce mélange de richesse culturelle, de patrimoine et de folklore est actuellement essaimé par la Agència Catalana de Turisme avec l’Année de la Catalogne en France (jusqu’en mai 2011), et vous comprendrez l’engouement des Français pour leurs voisins. Sur le blog enviedecatalogne.fr, ils peuvent sélectionner les évènements catalans organisés en France pour, peut-être, se rendre un jour dans la « Terre de génies ».

Arrogance et guide du Routard

Quoi de plus flatteur que d’être vus comme des consommateurs avisé de la culture d’une région ? Et, pour ceux à qui cela ne suffirait pas, comme la source de revenu qui donnera un coup de pouce supplémentaire à une économie qui tourne au ralenti ? Reste le danger que tout cela nous fasse un peu tourner la tête et que nous tombions dans un autre de nos travers habituels : l’arrogance. « C’est vrai que les Français sont intéressés et curieux de tout, mais en même temps, ils vous montrent qu’ils connaissent déjà tout, ils demandent beaucoup, mais c’est souvent pour valider leur propre culture générale », reconnaît Josefina.

Quoiqu’il en soit, l’étude réalisée par TNS Infratest ne colle pas tant que cela au cas catalan. Ici, les Français, loin d’être pingre, sont ceux qui ont le plus dépensé à Barcelone en 2010 : 300 millions de claqués dans les établissements financiers barcelonais ! Ils ne sont pas non plus aussi impolis qu’on ne le dit, même si leur politesse peut tirer jusqu’au manque de sociabilité, voire à la pédanterie. Alors un conseil pour les nombreux d’entre-nous qui iront à Barcelone ou sur les plages catalanes cet été : ici, un sourire vaut parfois mieux qu’une citation de Voltaire, et l’art de la conversation peut apporter plus que l’historique du guide du Routard !

Article publié initialement sur Rézo, magazine des francophones d’Espagne

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